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La ménagerie de papier / Ken Liu. Traduit et harmonisé par Pierre-Paul Durastanti. Coédition le Bélial’ & Quarante-Deux, 2015. 424 pages.
« Elle plaque la feuille sur la table, face vierge exposée, et la plie. Intrigué, j’arrête de pleurer pour l’observer. Ma mère retourne le papier et le plie de nouveau, avant de le border, de le plisser, de le rouler et de le tordre jusqu’à ce qu’il disparaisse entre ses mains en coupe. Puis elle porte ce petit paquet à sa bouche et y souffle comme dans un ballon.“Kan, dit-elle. Laohu.” Elle pose les mains sur la table, puis elle les écarte.Un tigre se dresse là, gros comme deux poings réunis. Son pelage arbore le motif du papier, sucres d’orge rouges et sapins de Noël sur fond blanc. J’effleure ce qu’a créé Maman. Sa queue bat et il se jette, joueur, sur mon doigt… »
Oui cette 4ème de couverture est magnifique et est réellement représentative du style de la nouvelle dont les lignes sont extraites. Et, attention, ne faites pas comme moi qui suis tombée sous le charme de ce texte sans prêter attention à la suite… et ai été fort surprise de découvrir qu’il s’agissait d’un recueil de nouvelles. Comme souvent dans ce type de recueil il y a des textes qui vous touchent plus que d’autres. La ménagerie de papier fut sans doute les pages que j’ai considéré comme les plus belles ; on y retrouve des thèmes qui semblent chers au coeur de Ken Liu : la famille et les difficultés de communication, le déracinement, un soupçon de fantasy … L’émotion est dans chaque mot, chaque acte du côté de la mère, de l’enfant ou de ses animaux de papier. Ce n’est pas pour rien si cette nouvelle donne son titre à l’ouvrage car je n’ai pas été la seule à y être sensible si j’en crois les nombreux prix qu’elle a reçus.
En tout 19 textes composent cette édition. Certains affichent un futurisme en vous projetant dans l’espace ou dans des mondes extra-terrestre, ou une écriture originale (il faut le lire sans penser, juste se laisser bercer par le texte pour essayer de l’assimiler). Enfin d’autres semblent répondre à nos inquiétudes relatives à la part prédominante que prennent certains outils informatiques tels Facebook ou Google. Ici il s’appelle Centillion, le big brother de votre quotidien qui vous dit quoi faire, quoi dire. Que devient votre spontanéité, votre libre arbitre lorsqu’un outil vous souffle les réponses au cours d’un premier rendez-vous tout en ayant sélectionné la personne qui a le plus de chance de vous correspondre ?
Ainsi que je le disais je ne suis pas une inconditionnelle de tous ces écrits, mais le choix des textes réunis, la composition : l’ouvrage commence dans un monde extra- terrestre et, vers la fin, différents textes semblent se répondre concernant le futur de l’humanité ; entre eux des textes plus « réels » tels ceux évoqués ci-dessus ou qui nous parlent davantage, car presque liés à notre quotidien. Bref, pour ceux qui s’intéressent a minima à des textes ou des thématiques SF, vous devrez y trouver votre bonheur.
Je vous renvoie vers Un papillon dans la lune qui en parle très bien et dont les coups de coeur ou incompréhensions correspondent à mon ressenti.