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Le rêve de Ryôsuke / Durian Sukegawa. Traduit du japonais par Myriam Dartois-Ako. Albin Michel, 2017. 314 pages.
Après Les Délices de Tokyo, porté à l’écran par Naomi Kawase, Durian Sukegawa signe un second roman tout aussi poétique, lumineux et original. Le jeune Ryôsuke manque de confiance en lui, un mal-être qui puise son origine dans la mort prématurée de son père. Après une tentative de suicide, il part sur ses traces et s’installe sur l’île où celui-ci a passé ses dernières années. Une île réputée pour ses chèvres sauvages où il va tenter de réaliser le rêve paternel : confectionner du fromage.
Mais son projet se heurte aux tabous locaux et suscite la colère des habitants de l’île… Jusqu’où sommes-nous prêts à aller pour réaliser nos désirs ? A travers les épreuves de Ryôsuke, Durian Sukegawa évoque la difficulté à trouver sa voie, soulignant le prix de la vie, humaine comme animale.
3 solitudes, 3 jeunes gens mals dans leurs peaux qui répondent à une petite annonce pour un boulot sur une île. Chacun a ses raisons, chacun cherche un sens à son existence. Pour notre personnage principal, Ryôsuke, la quête et les souffrances sont multiples. Si des éléments sur son mal être nous sont rapidement donnés, Durian Sukegawa, va nous apporter des éléments complémentaires au fil de l’eau, de l’existence et expériences qu’il va mener au milieu de ces insulaires pétris à la fois de traditions, parfois de solitude eux-aussi, et de leur fierté.
Immerger dans cet espace limité, face aux iliens, des liens se tissent en dépit des différences, des silences et des caractères. Si rapidement Tachikawa montre se failles et son histoire, pour Kaoru comme pour Ryôsuke, la patience reste de mise pour comprendre et appréhender leurs différences, leur passé. Ryôsuke se cherche, comme il cherche à comprendre le décès de son père, ses propres envies de suicide, d’abandon. En errant sur l’île, la rencontre avec un troupeau de chèvres va, d’une certaine manière, transformer sa vie. Ces chèvres semblent toujours être là au bon moment, lui permettant de se remettre en question, parfois plus sensibles ou plus humaines que les hommes qui l’entourent.
Tâtonnant, hésitant, Ryôsuke observe et apprend de ses pairs comme des animaux et plus particulièrement du troupeau de chèvres revenus à l’état sauvage ou de celles chez son ami Hashi.
Comme dans son roman « Les délices de Tokyo« , on retrouve les thèmes de l’expérience, de la tradition mais surtout un formidable goût pour la nourriture terrestre ; avec 3 fois rien Hashi transforme un repas en expérience gustative, vous faisant saliver, démontrant aux uns et aux autres l’importance de la transmission, démontrant qu’un produit qui nous paraît si simple demande : patiente, obstination, expérience et abnégation. Bien que fort différent ce nouveau roman de Durian Sukegawa a su me charmer, me laissait vagabonder dans cette île japonaise et découvrir la complexité du métier de fromager.