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archaîsme, écrivain, famille, intégrisme, jalousie, Véronique Ovaldé
La grâce des brigands / Véronique Ovaldé. Editions de Noyelles, 2013. 284 pages.
Quand Maria Cristina Väätonen reçoit un appel téléphonique de sa mère, dont elle est sans nouvelles depuis des années, l’ordre qu’elle avait cru installer dans sa vie s’en trouve bouleversé. Celle-ci lui demande instamment de venir chercher pour l’adopter Peeleete, le fils de sa soeur. Nous sommes en juin 1989, Maria Cristina vit avec son amie Joanne à Santa Monica (Los Angeles). Cela fait vingt ans qu’elle a quitté Lapérouse, et son univers archaïque pour la lumière de la ville et l’esprit libertaire de la Californie des années 70.
Elle n’est plus la jeune fille contrainte de résister au silence taciturne d’un père, à la folie d’une mère et à la jalousie d’une soeur. Elle n’est plus non plus l’amante de Rafael Claramunt, un écrivain/mentor qu’elle voit de temps à autre et qui est toujours escorté par un homme au nom d’emprunt, Judy Garland. Encouragée par le succès de son premier roman, elle est déterminée à placer l’écriture au coeur de son existence, être une écrivaine et une femme libre.
Quitte à composer avec la grâce des brigands.
Un narrateur anonyme nous raconte l’histoire de Maria Cristina et, très vite une chute dramatique nous vient à l’esprit par cette astuce de la narration. Mais, avant cet épilogue, laissons-le nous dire la vie de cette jeune auteur et ses multiples vies.
Car avant de devenir un auteur reconnue, cette jeune femme indépendante, Maria Cristina fut la fille de… d’un taiseux et d’une femme ayant sans doute besoin de soins et qui pour se construire se jeta dans les bras de la religion, sous sa forme la moins positive : l’intégrisme. Au fur et à mesure de cette mise en abîme de la vie passée de Maria Cristina, ce sont tous les moments de folie de sa mère qui vont émerger et qui ont fait d’elle, en partie ce qu’elle est devenue. Une construction à la dure grâce à un esprit fertile et propre à s’échapper des situations extrêmes. Mais ce vécu de l’enfance n’est pas unique, il y a aussi tous ses acquis de la jeunesse, cet exil volontaire en Californie, ses rencontres improbables avec une jeune femme émancipée et aux antipodes de son éducation : Joanne, puis avec Claramunt cet écrivain / mentor qui deviendra son amant et la pousse un peu plus dans la voie de l’écriture, tout en sachant y trouver son compte.
Des étapes dans sa vie qui, à chaque fois la poussent de l’avant. Une enfant de prime abord sans armes, mais dont l’intelligence et la force de caractère vont lui permettre de se construire et de réaliser une partie de ses rêves. Alors, une nouvelle fois, la vie n’est pas parfaite, mais cette introspection dans la vie de Maria Cristina, ses aléas et soubresauts sont finement amenés pour faire de ce texte, même raconté par une tierce personne, un récit riche et attachant.