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Le souffle de l’harmattan / Sylvain Trudel. Les Allusifs, 2002. 164 pages

Pour être animé par l’utopie et les élans d’une jeunesse idéaliste et généreuse à qui aucune vision d’horreur n’a été épargnée, Le souffle de l’harmattan n’en est pas moins un roman ambigu sur les illusions de l’enfance et sur une fin de l’innocence ; sur l’éternel abîme entre le rêve et la réalité.

Certainement l’ouvrage pour lequel j’étais la plus dubitative au moment de l’ouvrir et de commencer à le lire. Quel était le sujet ? Je ne savais pas trop. Je trouve les textes publiés aux Allusifs souvent magnifiques, mais pas dans le style où vous pouvez faire deux choses en même temps et, je savais par avance qu’il me serait difficile de vous parler de cette lecture. 1ères lignes, je m’accroche, cherchant toujours la thématique qui va me permettre de m’installer dans l’histoire et puis… deux enfants adoptés : pour l’un cela est affiché, sa couleur de peau parle pour lui : Habéké Axoum, jeune africain a été adopté par un couple québécois. Pour Hugues Francoeur, c’est au détour d’une conversation entre ses parents qu’il a découvert la vérité.

Ces deux enfants cherchent leurs racines. Pour Habéké qui a de larges souvenirs de son enfance, de sa culture, l’assimilation à cette nouvelle vie semble parfois plus difficile, même si de prime abord, c’est vers notre narrateur, Hugues, que se penchent nos interrogations. En effet, il n’a aucun passé autre qu’avec sa famille et cette révélation lui fait entrevoir les différences de traitement entre ses frères-soeurs, une sensation d’être de trop.  Camarades de classe, ils se retrouvent pour une 15aine au chalet des parents d’Habéké. Là, on pourrait rire des errances de ces enfants, des bêtises qu’ils enchaînent si nous ne savions pas leur quête d’ Ityopya (le pays natal mythifié de cet enfant d’Afrique, l’île où sa mère l’attend pour Hugues). La langue est chantante mêlée de québécois aisé à entendre et j’ai suivi avec tendresse ces deux garçons. Mais leur quête, contrairement aux rêves de beaucoup d’enfants ne va pas s’arrêter avec la fin des congés. Au contraire elle continue et s’amplifie. Provoquant des catastrophes, jusqu’à l’hospitalisation de l’un d’entre eux, mais toujours bercés par leurs utopies, certains de leurs connaissances, allant encore plus loin, toujours plus loin.

Paradoxalement, alors que le temps passe, on s’attendrait à ce que chacun ait appris de ces erreurs et des souffrances subies, mais pas du tout. Ils iront jusqu’au bout ; l’Harmattan, ce vent qui provoque une augmentation des hospitalisations (pour diverses raisons) n’y étant sans doute pas étranger.

Un texte qui peut parfois sembler dérangeant, mais que j’ai trouvé magnifique. Oui la thématique est davantage liée au passage à l’âge adulte (un échec dans leur cas et un problème de cohérence au niveau des âges annoncés lorsqu’on réfléchit un tantinet), mais c’est surtout cette recherche de filiation, cet idéal de l’existence auquel nous aspirons tous qui m’a paru le plus sincère dans ce texte court mais condensé.

Un coup de coeur pour Papillon (je ne suis absolument pas surprise), Catherine sur Biblioblog (le temps passe), Karine:) chez qui j’avais noté cette lecture.