https://i0.wp.com/www.decitre.fr/gi/47/9782070403547FS.gifLe Maître de Ballantrae / Robert Louis Stevenson. Texte présenté, traduit et annoté par Alain Jumeau. Postface de Jean Echenoz. Gallimard, 2000 (Folio Classique). 322 pages. 4 *
Chef d’oeuvre de Stevenson, ce roman d’aventures, qui commence en Ecosse en 1745, entraîne le lecteur sur les champs de bataille, sur les mers avec les pirates, vers les Indes orientales et enfin en Amérique du Nord avec sa terrible forêt sauvage, hantée par des trafiquants, des aventuriers patibulaires et des Indiens sur le sentier de la guerre.
On retrouve l’inspiration de L’Ile au trésor , enrichie de celle du Cas étrange du Dr Jekyll et Mr Hyde, car Stevenson poursuit son exploration obsessionnelle du mystère et des ambiguïtés du mal. Le héros, James Durie, Maître de Ballantrae, livre à Henry, son frère cadet, un combat sans merci. Stevenson décrit la fascination romantique que ce protagoniste diabolique, séduisant, raffiné, intelligent, implacable et sans scrupules, est capable d’exercer sur ses proches et jusque sur les narrateurs chargés de relater ses aventures prodigieuses.

 

C’est grâce à Bookomaton (Shame on me mes liens ne sont toujours pas mis à jour :s) que j’ai lu Stevenson qui était enfouie au fond de ma mémoire. Comment résister à un écossais a-t-elle dû se dire en me l’envoyant ? Et elle m’a confirmé la semaine dernière que c’est plus particulièrement la présence de James, – véritable Dr Jekyll par sa prestance, parole et physique que Mr Hyde par sa violence, son autosuffisance et l’être abject qu’il sait être pour parvenir à ses fins – était pour beaucoup dans l’ouvrage envoyé.

Voilà l’excuse toute trouvée 🙂 J’enchaîne les classiques mais cette fois avec des personnages masculins portant beaux !

Et oui tout le monde peut trouver son bonheur dans cette oeuvre de Stevenson : histoire, et faits d’armes, pirateries, voyages à travers des mondes lointains et méconnus à l’époque, semi-fantastique, évocation diabolique et histoire familiale peuplée d’amours fraticides et de trahison. Et oui, il y a également des femmes au coeur de cette histoire….

Le mal et le malheur s’abat sur les Ballantrae de prime par une préférence d’un père pour son fils aîné, James Durie. Un raccourci rapide, il est certain de l’origine des drames qui se jouent sous nos yeux et dont toute la famille aura à souffrir. Cet homme adulé incarne les attraits de la perfection à bien des égards, mais symbolise le mal par ses facettes opposés.

Ayant choisi de jouer avec son frère le soutien au prince Bonnie Charles, il passe chez les jacobites pendant qu’Henri reste fidèle à Londres. Ainsi la famille est certaine de s’en sortir à bon compte suivant que l’un des deux parties soit victorieux. Mais le fait d’avoir refusé de choisir et d’opter pour la « facilité » va entraîner la chute des Durie. Henry prend la place de son frère au domaine, mais l’absent et les pertes entraînées par la bataille de Culloden en Ecosse provoque la déférence à son égard, amplifiée par les esprits retors et le mal qui s’installe partout. Comme il est fréquent, la mort fait oublier les erreurs et les aspects négatifs de James. Il devient légende par les souvenirs de sa beauté et de son esprit, ainsi que pour ce que représente cette défaite.

Stevenson sait mettre en avant les travers de l’être humain et montrer combien l’homme est versatile. Il décrit avec une très grande justesse les caractères et le revirement des uns et des autres. Il joue sur les effets de « manche », sur tous les thèmes qui font rêver son lectorat, manie avec art les rebondissements.

Pour raconter l’hsitoire et éviter de prendre fait et cause pour l’un ou l’autre des deux frères, il opte pour une narration extérieure faite par l’intendant Mackellar, sensée nous apporter une vision juste et sans parti pris. Mais contrairement à ce que l’on croyait acquis, l’un des frères n’est pas l’incarnation du mal et l’autre du bien, les contrastes existent et les manipulations peuvent coexister. La souffrance est peut être à l’origine des bouleversements dans le caractère de Mr Henry, néanmoins ces modifications donnent un élan et un jour nouveau à l’histoire qui permet à l’auteur de nous prendre à partie et nous montre combien il est difficile de croire un homme meilleur qu’un autre pour des questions de caractères, de faits, etc…

Alors avez-vous choisi votre camp ou aurez-vous envie comme moi de donner des claques à l’un pour son inertie et à l’autre pour son insolence ?